Au premier abord, la Croatie me déroute un peu, il est vrai que je n’ai pas trop préparé ce voyage, il vient en complément d’une visite de Venise. Après quelques kilomètres, une cabine de péage se présente et m’affiche un superbe 20.00, je trouve cela très cher, râle un peu et donne un billet de vingt euros au guichetier, il me rend trois billets de cinq euros plus quelques pièces. Je ne comprends pas, à l’arrêt suivant, alors que je range la monnaie, une pièce me semble bizarre, il s’agit d’un kuna et je réalise enfin que la monnaie du pays n’est pas l’euro. Ceci n’empêche pas de régler ses frais avec cette monnaie, les Croates manient les deux pratiquement comme s’il s’agissait de la même.
Accrochées à la pente, un peu engoncées par les bâtiments de la ville, les arènes romaines de Pula sont bien conservées, dommage que l’on manque de recul pour en avoir une bonne vue d’ensemble.
Je ne sais pas comment je me suis débrouillé, mais à Brerstova je loupe l’embarquement pour l’île de Cres. Je poursuis donc la route par Rijeka, puis j’emprunte le pont qui relie l’île de Krk, nous y apprécions le fromage de brebis vendu au bord des routes, Krk la ville et surtout Baska tout au Sud.
Tout au long de la cote dalmate l’Adriatique dévoile des sites superbes. La couleur de la mer, selon la lumière va du pâle turquoise à l’intense lapis-lazuli, les criques tentatrices sont plutôt émeraude translucide et profond. Quelques perles, Zadar, Sibenik, Trogir, Split ponctuent le parcours, la plus belle d’entre elles, Dubrovnik se trouve tout en bas. Avec les reflets d’argent de la mer et le soleil aux rayons d’or, il y a là, matière pour une belle parure. Notre vue vient obstinément buter sur le chapelet d’îles qui, sans discontinuer, longe la cote. De ce fait l’Adriatique est une mer sans horizon, elle est aussi très abritée des vents du large et pas plus agitée qu’une piscine au repos. Malgré une petite bronchite qui me secoue de quintes de toux, je ne résiste pas à l’envie d’un petit plouf avec palmes tuba et masque, je rencontre des daurades, des mulets, des sars, des marbrés et autres poissons auxquels je n’ai pas été présenté, ils sont pourtant si peu farouches que l’on irait presque jusqu’à se serrer la nageoire. La nuit qui suivra ne serra pas la meilleure, et j’ai l’impression que Françoise me fait les gros yeux…
Nous visitons Dubrovnik avec Annick et Jean, Un couple de camping-caristes du Calvados. Nous les avons rencontrés la veille au sympathique petit camping familial de Mlini qui nous accueille pour pas cher, bus et commerce à proximité, cela nous convient parfaitement. La balade sur les remparts nous prend deux heures et demie, belles vues sur l’Adriatique et sur la ville. Assiégée et bombardée en 1991/92 elle a bien été restaurée même si quelques petites traces persistent encore. Instant magique, alors que l’ensemble des cloches de la cité sonnent midi, des quatre coins de la ville, tous les pigeons convergent simultanément vers un point commun. Il paraît que chaque jour à la même heure, un homme leur distribue de la nourriture. Après le petit resto du routard d’Annick, Nous nous laissons aller à la flânerie à notre gré ou de celui des ruelles.
J’avais l’intention de visiter les bouches de Kotor au Monténégro, à l’entrée du territoire il est demandé de s’acquitter d’une écotaxe de trente euros. Trouvant le tarif élevé pour quelques kilomètres et une demi-journée, on me répond que c’est la loi et donc obligatoire. Je préfère faire demi-tour. Après tout, si les écolos monténégrins savent comment dépolluer leur atmosphère de mes gaz d’échappement avec trente euros, il faut qu’ils nous donnent la recette. Si par contre il s’agit ne nous dissuader d’aller leur rendre visite en les polluant, c’est réussi.
Quelle insouciance de traverser le « vieux » pont de Mostar, avec l’indifférence du touriste, d’un pas léger un petit sac sur l’épaule. Son arche unique enjambait la Neretva, assurant un lien entre les communautés Croates et Bosniaques réparties des deux cotés de la rivière. Les forces Croates le bombardèrent en 1993, il fut reconstruit par l’Unesco et inauguré en 2004. Depuis les touristes se sont intéressé à lui, des boutiques à souvenirs se sont installées autour, on y vend des stylos en forme de balles de mitrailleuses d’un joli calibre, je trouve plus sain d’acheter des Saintes Vierges à Lourdes. Ici, en Bosnie-Hérzégovine, les Stigmates de la guerre sont bien présents, beaucoup d’immeubles sont restés en l’état, c’est assez impressionnant. « Connais toi toi même » nous disait Socrate il y a bien longtemps, plus près de nous, Soljenitsyne avouait, « je comprends le goulag parce que je regarde en moi même ». C’est pas que ce soit difficile à comprendre, mais nous ne sommes que des hommes, et, avec nos faiblesses plus fortes que notre volonté, comprendre ne suffira pas.
Marc Octobre 2008